Prendre le thé au Sénégal, c’est bien plus que prendre une boisson chaude : c'est tout un cérémonial. Ce temps s’apparente un peu au temps de l’apéro en France : un prétexte pour un temps de partage, de convivialité et d’échanges à bâtons rompus. Si les Sénégalais ont emprunté aux Touaregs mauritaniens cette tradition, ils en ont adapté la technique de préparation qui a ses propres codes.
On fait bouillir l’eau sur le brasero puis on incorpore le thé dans la théière dont on bouche souvent le bec avec du papier pour éviter que la préparation déborde. Puis on ajoute du sucre et la menthe et on refait chauffer puis mijoter. Une fois le thé prêt, on le transvase dans un verre, puis du verre à la théière, puis de la théière à un autre verre, puis de verre en verre, bien haut pour aérer et faire de la mousse, plusieurs fois : le thé doit être servi bien mousseux (1 cm minimum). Ces manipulations permettent aussi de refroidir légèrement le thé brûlant : on verra pourquoi un peu plus loin. Puis on boit (en évitant le fond du verre car il reste toujours quelques morceaux de feuilles de thé).
La même opération est renouvelée pour le deuxième et troisième thé, pour lesquels on rajoute de la menthe et du sucre. Les verres sont rincés entre chaque thé. On a coutume de dire que le premier (l’Eweul) est « amer comme la mort », généralement réservé aux hommes de la maison, le deuxième (Niarel) est « doux comme la vie » et le troisième (Tarhis) est « sucré comme l’amour ».
L’Ataya constitue une activité peu onéreuse d’autant plus que la plupart du temps, chaque participant apporte qui du thé, qui du sucre, qui du charbon. On prévoit toujours plus de thé pour en proposer aux gens qui passent. Accepter l’ataya, ce n’est donc pas juste boire un verre de thé "vite fait sur le pouce" mais c’est prendre le temps de se poser, de discuter le temps de 3 tournées : c'est l'esprit Téranga. Durant votre séjour à Keur Camape, vous verrez très souvent dans les villages traversés des petits groupes rassemblés à même la rue autour d'un brasero : c'est l'ataya.
Ceci dit, il n’est pas question de siroter tranquillement votre verre de thé. Il n’y a généralement que 3 verres à disposition des invités : les autres attendent donc que vous ayez terminé le vôtre pour que le préparateur de thé puisse leur servir le leur. D’ailleurs, si les Sénégalais aspirent bruyamment leur thé (slurp !), c’est pour mieux refroidir rapidement le thé entre leurs lèvres et ainsi le boire plus vite.
C’est un signe de respect envers les autres : on se dépêche de boire son thé pour que les autres puissent déguster le leur plus rapidement. Le préposé au thé attend en effet votre verre pour le rincer, le remplir à nouveau et le servir à un autre.
Venu des Touaregs du désert, le thé sénégalais est un excellent moyen de lutter contre la chaleur. Boire chaud quand il fait chaud a en effet deux avantages : ça évite que votre corps fournisse un effort pour réchauffer un liquide trop froid, ce qui a comme conséquence d’augmenter encore la température de ce corps : même si c’est contre-intuitif, il est recommandé de ne pas boire de boisson fraîche quand on a chaud. Cela permet également et surtout, de provoquer la transpiration qui va permettre une évacuation de la chaleur. Si un jour au Sénégal vous avez trop chaud, prenez donc un thé à la menthe : cela vous apaisera…
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